Coups de foudre

Parce que je m’intéressais au Japon, il s’est mis à lire des romans japonais. Naturellement, il est tombé tout de suite sur certains titres très connus que je ne connaissais pas. C’est ainsi, dans cette ambiance de sérendipité, que j’ai entamé la lecture des Amants du Spoutnik, de Haruki Murakami. L’intrigue ? Un triangle amoureux tout en mélancolie et délicatesse. Le narrateur aime Sumire, sa meilleure amie, apprentie écrivain, qui aime Miu, une femme plus âgée qu’elle et brisée par un étrange accident. Ils vont se perdre et se retrouver au Japon, puis en Italie et en Grèce. Au-delà de ces rencontres, il y a la question, insondable et insoluble, de la solitude, tantôt présentée comme un état désirable, tantôt signifiant une impossibilité de communiquer une quelconque émotion (bien que les chats, toujours présents dans les romans de Murakami, puissent devenir d’excellents messagers).

La solitude est celle des habitants des grandes villes, étrangers parfois à leur propre famille, voyageurs décalés, et pas seulement par rapport aux fuseaux horaires. Mais les gens solitaires tombent amoureux aussi, ce qui ne les empêche guère de disparaître de temps en temps en emportant tous leurs mystères avec eux, disparitions trop oniriques pour être inquiétantes, inscrites pourtant dans une certaine normalité, avec tous leurs inconvénients pratiques. Dans cet absurde tout à fait vraisemblable, ce qui me paraît particulièrement fascinant chez les Amants, c’est la facilité avec laquelle on finit par suivre la trace des personnages, afin de trouver la bifurcation, la faille dans la routine, et on voudrait, à la fin du récit, continuer à explorer leurs labyrinthes et en chercher les sorties (des portes chinoises?). Ce sont probablement les effets d’un style net, faisant l’économie du superflu, où le monologue ne dérive jamais en brouillage sentimental,  où la place du non-dit n’est pas usurpée et les détails du décor semblent toujours nécessaires, comme l’île grecque  réduite à des traits très simples  mais indispensables à une certaine initiation.   

Et, trace de mes promenades sur le Web, cette phrase qui m’a profondément émue hier, bien qu’elle n’ait aucun lien avec mon sujet. Quoique…

Je ne risque rien. Les ruines, c’est indestructible. (Merci au forum Nota Bene)

Haruki Murakami, Les Amants du Spoutnik, Belfond Etranger, 2003

Commentaires

  1. Très agréable présentation, Inma. Fluide et précise à la fois. Merci.

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  2. Merci HL, je recommence tout doucement à poster un billet par semaine. Je me demande toujours comment vous faites! :-) A propos, où peut-on commander (ou acheter) votre livre en Suisse? Le site de Publibook se trouve en France, il me semble...

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  3. Ahhh, je viens de voir le liste sur votre blog, inattention, quand tu nous tiens :-)

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  4. "Les voix du hasard" sont impénétrables!
    Je vous avais acheté un Murakami!!! mais puisque vous aimez et connaissez cet auteur, je vous aurais sans doute offert un livre que vous aviez déjà lu : La Ballade de l'impossible". Son premier roman dont il a été tiré un film. N'ayant pu nous rencontrer et l'ayant lu, je l'ai offert à une amie.

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  5. Justement, celui-là je ne l'ai pas lu, merci quand même :-)

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  6. Merci pour ce beau billet.
    A propos de ruines, je suis tombée par hasard sur cette phrase l'autre jour :
    "La vertu, comme le corbeau, niche dans les ruines. Elle habite les creux et les rides du corps". (Anatole France)

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  7. Merci l'Absente, d'apporter votre présence virtuelle et des répliques littéraires :-)

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