Lectures d’été : Le cygne noir (où l’on apprend qu'il est possible de tout prédire, sauf l’avenir)

Mieux vaut tard que jamais, puisque la traduction française était déjà sortie il y a un certain temps, quelques soirées sont suffisantes pour lire Le Cygne noir, de Nassim Nicholas Taleb, où se croisent, dans un grand hall d’aéroport, la bibliothèque d’Umberto Eco, la guerre du Liban, l’épineuse question du statut social des chercheurs, la vaste plaisanterie des prix Nobel d’économie, l’arrogance épistémique, les auteurs français méconnus en France et les prévisions basées uniquement sur des modèles de type courbe en cloche.

 Le fil conducteur du Cygne Noir (métaphore désignant les événements imprévisibles qui devraient creuser des failles dans toute théorie de la connaissance sérieuse -ce n’est pas parce que tous les cygnes connus sont blancs qu’il n’en existe pas de noirs-) est le principe d’incertitude. Il peut être appliqué à tous les aspects de la connaissance et de la vie, car rien n’est plus éloigné de l’abstraction que le besoin de trouver un horizon plausible pour demain, une explication quelconque basée sur les expériences précédentes ou sur les connaissances qu’on croit posséder.  Cela paraît simple, mais les nombreuses anecdotes, expériences et événements historiques évoqués dans l’ouvrage rendent compte des différents biais cognitifs et des situations particulières qui peuvent en tout moment fausser notre jugement, mener à des estimations exagérées et occulter des connaissances utiles sous prétexte qu’elles ne correspondent pas à des modèles communément acceptés. On pourrait s’en amuser, si les erreurs qui résultent de ces biais épistémologiques ne touchaient pas des domaines comme la finance ou la médecine.

Extrêmistan et Médiocristan sont deux territoires antinomiques, qui peuvent correspondre à des moments de l’histoire ou des types de société. En Extrêmistan, des événements imprévus ayant de lourdes conséquences peuvent se manifester assez facilement, tandis que la vie en Médiocristan semble beaucoup plus routinière et sans soubresauts.  Selon Taleb, le monde moderne ressemble davantage à l’Extrêmistan. Et c’est là que les Cygnes Noirs ont plus de chances d’apparaître. Mais ils vont être rapidement cachés ou sous-évalués par des interprétations ultérieures visant à expliquer l’inexplicable, ou par les biais de narration qui assimilent un événement à une histoire préétablie (dont les détails attirent l’attention et masquent le fond). Ce qu’on ne voit pas cesse d’exister, et c’est là que le hasard peut être perçu comme une forme d’ignorance.

Cependant, chaque discipline possède ses instruments d’erreur de prédilection, et si l’on trouve de préférence des biais de narration ou de confirmation dans l’histoire ou le journalisme, l’économie semble collectionner les bourdes (ce que l’auteur appelle « préférer avoir tort avec précision ») en se basant sur le postulat que l’on peut calculer les probabilités (uniquement) à partir d’une moyenne ; en réduisant les probabilités d’écart de manière exponentielle, le modèle obtenu ne peut considérer les aberrations (les cygnes noirs) et n’est pas applicable à un monde confronté à des changements et des ruptures importantes. C’est ainsi que l’auteur rappelle les passionnantes théories de Poincaré sur la difficulté de se projeter dans l’avenir sans tenir compte d’un nombre toujours croissant de facteurs incertains, et de la complexification liée à un effet de diffusion, d’effets entraînant d’autres effets (idée reprise ultérieurement sous le nom de « théorie du chaos »), ou évoque, par opposition aux courbes gaussiennes, celles de Benoît Mandelbrot, qui se basent sur la géométrie fractale et qui intègrent des variations extrêmes et certains hasards. Je suis restée pourtant sur ma faim, malgré la densité de l’essai, à propos des limites de la connaissance et l’absurdité d’une planification « scientifique » selon Friedrich Hayek, mais c’est une bonne raison pour lire ou relire ses œuvres.  
  
Le Cygne Noir peut, enfin, être lu comme un éloge de la curiosité et du tâtonnement, une invitation à s’éloigner de l’arrogance et à insuffler un peu de modestie dans des milieux, notamment universitaires (mais pas seulement). La connaissance n’est pas un bien qui se possède, mais une hypothèse mouvante et malléable, avec toutes ses fragilités, qui peut être démentie, étayée ou transformée au besoin. Mais ce qui me plaît, chez Taleb, c’est l’osmose qui s’établit entre les différentes disciplines, la façon dont la philosophie et les mathématiques deviennent vivantes dans leurs applications quotidiennes, sans oublier l’importance du faux. Reconnaître la possibilité de se tromper est quelque chose d’essentiel. Après tout, le plus intéressant est ce qu’on ne sait pas, et les livres non encore lus.


Nassim Nicholas Taleb, Le Cygne noir. La puissance de l’imprévisible. Les Belles Lettres, 2010.

Commentaires

  1. Houlala ! Voilà de quoi risquer une hernie neuronale un lundi aux aurores…

    Certes, mais il existe suffisamment de constellations pour illuminer la nuit, une fois que l'on est sorti du Temple des Certitudes Eclairantes. Un mien compère avait autrefois écrit un billet, intitulé "Chaos, Tao et Entropie", qui permettait de gagner un ticket pour d’autres cosmogonies. Il n’est pas près d’arriver, ou même de s’en retourner, car "le vrai voyageur n’a pas de plan établi et n’a pas l’intention d’arriver" (Laozi).

    Dire que l’esprit humain a une capacité prodigieuse à boucher les trous et à combler les vides, n’étonnera personne. Cet art consommé du vrai et du faux semblant, permet de créer des "choses [qui] flottent dans les limbes de la pensée humaine" (Flaubert), comme autant de réponses à des questions sans réponse, parce que la réponse ne se situe souvent pas au même niveau que la question.

    … mais j’espère avoir pu contribuer à réduire la tension intellectuelle du moment.

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  2. Super, plutôt à la maintenir qu'à la réduire, mais j'aime cela.

    Parce que la réponse ne se situe souvent pas au même niveau que la question, ou parce que la réponse implique d'autres questions qui n'ont pas été posées, l'analepse est faite pour ça, mais je reconnais qu'aux aurores... Cela dépend. J'ai toujours considéré le travail nocturne comme intéressant, car les nuisances qu'on peut générer soi-même sont considérablement réduites (pas de fuite possible en ville, pas question de faire fonctionner la machine à café ou le sèche-cheveux)...

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  3. Voilà un livre que je cours acheter pour l'offrir à mon épouse statisticienne et épidémiologue, que cela nous donne du blé à moudre pendant les longues soirées d'un hiver que je prévois froid, pluvieux, venteux et brouillardeux, mais je peux me tromper, personne n'est parfait!

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  4. Cela peut être rassurant de se tromper, je m'en suis aperçue il y a peu par rapport à une malheureuse histoire personnelle. Cela peut être paradoxalement rassurant de savoir que le raisonnement pouvait être juste, mais basé sur des prémisses fausses, que d'autres interprétation étaient tout aussi bien possibles. Découvrir le faux est une démarche vraie.

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  5. Allez vous me dire que vous avez des réponses à des questions jamais posées ? Dans ce cas, j'ai quelques questions qui ne correspondent pas encore aux inquiétudes du moment.

    On en discute à l'occasion.

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  6. Houlala! Je vais chercher un dico...:-)et je reviendrais... philosopher avec les universitaires (+_+)

    En parlant de ticket :"gagner un ticket pour d’autres cosmogonies." je suis plongée avec délices dans "Au-delà de cette limite votre ticket n'est plus valable" de Romain Gary (que j'aime par dessus tout) qui est plus à ma portée, si je me fie à ce brillant billet.

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  7. Tout est à votre portée Ambre, il suffit d'un dico et d'un peu de chance :-)

    Merci pour "Au-delà de cette limite..." le titre m'intéresse et le résumé que je viens de lire sur wikipédia a éveillé ma curiosité.

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  8. Inma, vous êtes adorable de me laisser croire que je puisse converser avec des universitaires.
    Oui, ce roman (autobiographie? il y a de lui dans ses personnages) devrait surtout intéresser nos messieurs... Romain Gary a devancé Philip Roth dans ses questions existentielles sur... oserai-je prononcer ce mot... l'andropause? J'avoue que c'est aussi laid que l'autre, la ménopause, alors disons... euh... testotérone(=_=). J'ai eu besoin de faire une petite pause avec Thomas Bernhard, que je reprendrai, après Gary (que je ne lâche jamais), plein d'entrain.

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  9. Philosopher avec un dictionnaire à portée de main, c'est comme faire l'amour en consultant un traité d'anatomie.

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  10. A portée de main ne veut pas forcément dire qu'on le consulte, la fonction de certains objets étant avant tout d'encourager ou de rassurer.

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  11. Autrefois, je me demandais s'il existait, à part moi-même, d'autres lecteurs de dictionnaires et autres encyclopédies. On commence par chercher un truc, puis on trouve un autre encore plus curieux, puis un autre à partir de celui-ci et ainsi de suite, à ne jamais finir. Ceux à qui j'avais parlé de cette habitude m'ayant regardé bizarrement, j'ai décidé de la taire, mais plus tard j'ai compris que ceux que cette pratique passionnait étaient nombreux.

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  12. @Inma : j'en suis, de ceux (celles) qui ont cette habitude.
    @ P.A. : MDR! Dans ce cas, mieux vaut consulter un traiter d'anatomie que sa montre (=_=) mais le mieux est tout de même d'oublier toutes nos connaissances pour aller à la découverte de nouveaux horizons palpables. Et qui sait, nous mènerons non pas à cette "théorie du chaos" (0_0) mais à prendre des chemins chao(éro)tiques!

    Me suis-je éloignée du sujet?

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  13. Corrections : ... horizons,(virgule) palpables.
    et :
    ... nous mèneronT.
    Sorry.

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  14. La seule correction à faire était d'éliminer "celles", si je puis me permettre... Je n'utilise que le masculin, qui généralise, et lorsqu'il m'arrive d'écrire des barbarismes comme "écrivaine", "auteure" ou, pire encore "autrice" il faut seulement y voir une vénéneuse ironie de ma part.

    Sinon, les chemins de traverse, j'adore :-)

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  15. Bon, c'est l'heure du thé. Je reviens vers 18h :-)

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  16. Je collectionne les dictionnaires: j'en de toute sortes et de toutes les époques: français du XIIe siècle, français classique, mots rares & oubliés, synonymes perdus, adjectifs précieux, mesures anciennes, droit féodal, etc. Sans compter les grammaires, ni le Grévisse, ou l'art d'écrire et d'être lu en plusieurs langues. Plus 2'000 pages de dictionnaire français-néerlandais et réciproquement. Quelques dictionnaires d'Oxford ou des particularités régionales américaines. A compléter, bien sûr, avec quelques dictionnaires chinois-français, chinois-anglais ou chinois-chinois et des ouvrages encyclopédiques du XIXe siècle.
    Mais, on est moderne et on mentionne aussi plus de 200 ouvrages historiques anciens, et autres cartulaires médiévaux, sous forme numérique et gravés sur CD. Je crois qu'on fait le tour.

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  17. Pierre-André, vous me donnez envie de visiter votre bibliothèque, riche des plus curieuses fleurs de la lexicographie! Hélas, je ne possède ni le tiers ni le quart en matière de dictionnaires; ayant évolué au gré des vents et des courants les 15 dernières années, l'achat de nouveaux ouvrages me posait souvent d'insidieux problèmes en cas de déménagement. Désormais, ce sera différent, bien entendu.

    On se souvient du rôle de l'Encyclopaedia Britannica de 1902 dans l'oeuvre de Borges.

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  18. Lors de mon plus important déménagement en 1993 j'ai donné mes 24 volumes de l'Encyclopédie Universalis que je possédais à ma soeur, pensant que ça servirait aux études de ses enfants. C'était sans savoir qu'à l'âge où ils auraient pu s'en servir, Internet allait tout chambouler. Aujourd'hui, il n'y a que les amoureux des livres qui s'attachent à tout ce qui est "papier" et j'en suis, et j'avoue regretter de les avoir donnés. On panique quand on déménage et on se sépare de tas de choses, sans réfléchir vraiment, on est dans l'urgence et c'est après, qu'on a mal, qu'on se rend compte que l'on s'est séparé d'objets... qui avaient une âme. Et je ne parle pas que des livres. Vider une maison, une vie en quelque sorte (passé un certain âge), pour aller dans un appartement, c'est laisser une partie de soi-même. Ce doit être cela qu'on appelle : faire le vide? Oui, un grand vide.
    Mais donner c'est donner... et reprendre c'est voler. N'est-ce pas?
    Alors, un conseil : ne jetez, ne donnez rien avant de déménager. Attendez d'avoir emménagé.

    (C'était la minute de spleen (^_*))

    Mais :

    "Reconnaître la possibilité de se tromper est quelque chose d’essentiel. Après tout, le plus intéressant est ce qu’on ne sait pas,..."

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  19. Pour le spleen, moi qui aime les métaphores maritimes, les déménagements me font souvent penser à de naufrages, comme dans ces jeux où il s'agit de choisir ce qu'on emporterait dans une île déserte... et l'on se demande après où est passée cette robe si prisée, ces vieilles photos et ces autres échos du passé. On se conduit souvent comme des futurs locataires d'îles désertes, alors qu'on pourrait faire autrement. Après sept ans, c'est mon tour de déménager, mais cette fois je vais du plus petit au plus grand et le problème de la réduction nécessaire ne se pose plus, heureusement ;-))

    L'éternel départ!

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  20. Passer du plus petit au plus grand, c'est génial et c'est le privilège de la jeunesse Inma:)) Enfin, c'est ce que je crois, du moins en ce qui concerne les murs extérieurs. Pour l'intérieur, c'est dans le coeur et dans la tête que ça se passe et là, ça ne se mesure plus en mètres carrés mais en hectares (+_+) et il n'est plus question d'âge. Plus il y a de la vie plus il y a d'espace.
    (J'aurai mieux fait d'écrire mon journal au lieu d'envahir votre blog aujourd'hui)
    (Bonne nuit...)

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  21. La nuit a-t-elle été longue à devenir demain? Quoi qu'il en soit, nous y sommes, mais la lutte avec l'ange du Temps & de l'Espace n'est pas finie pour autant.

    Vous savez certainement, Mesdames, qu'on peut télécharger des pans entiers de bibliothèques, nationales ou privées, sur internet. J'ai un exemple sous les yeux, avec un CD de 700 mb contenant 66 livres, dont 6 dictionnaires imprimés aux 17e et 18e. Et ça représente un volume que 14 x 12 x 1 cm, pour moins d'1 franc. Laissez-vous tenter, il n'y pas mieux sur le marché.

    A propos d'île déserte, je suis devant ce choix. Mais il s'agit de la Chine et y envoyer un container de livres peut coûter le prix d'une petite voiture. Je penche pour l'instant vers une solution qui consiste à vendre tous mes meubles pour payer le voyage des livres. C'est dire leur priorité...

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  22. Choisir le rare, l'unique, et comparer les prix des containers.

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  23. Ou je fais comme pour l'Afrique, je liquide tout pour ne plus revenir ? A mon âge, le retour paraît moins plausible. Laozi dit aussi que c'est du vide que dépend l'usage: celui des bibliothèques aussi ? Une bibliothèque une fois pleine de livres a-t-elle moins d'âme qu'une bibliothèque vide ?

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  24. Devant une bibliothèque vide, la question qui se pose est celle du temps, c'est une bibliothèque partie ailleurs ou qu'on attend encore, mais une bibliothèque de l'avenir peut être tout aussi bien pleine, en considérant les livres pas encore lus, dont la lecture mènerait à d'autres ouvrages etc...

    Ce qui nous rappelle enfin le sujet de de billet. Merveilleux!

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  25. Mais, nous en avons constamment épousé les formes, pourtant...

    A part ça, la rentrée s'est bien passée ?

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  26. Oui, mais c'est ma dernière à Lausanne, cela va me manquer, les cours qui finissent tard le soir.

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  27. C'est vrai, j'avais cependant tellement envie de revenir sur le problème des livres non lus... Mais quid des livres à moitié lus? Quelle place dans la bibliothèque de sable?

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  28. Les livres à moitié lus! S'il s'agit de romans c'est donc qu'ils étaient ennuyeux si on ne les a pas terminés; je pense qu'on peut les enlever de la bibliothèque et encore je n'en suis pas sûre. La lecture peut s'avérer intéressante à un autre moment de notre vie. En revanche, s'il s'agit d'essais, de journaux intimes, de correspondances, il faut impérativement les garder dans notre bibliothèque. J'ai ainsi de nombreux livres que je n'ai pas encore lu entièrement mais dans lesquels je pioche de temps en temps des morceaux de textes ou vers lesquels je reviens de temps en temps comme le Journal intégral de Virginia Woolf, le Journal et les Correspondances de Stendhal, les ouvrage de Georges Bataille, d'Antonin Artaud. C'est rare que je les lise complètement mais souvent je m'y plonge. Et il y en a bien d'autres.

    Le terme de "bibliothèque vide" m'interpelle. C'est donc qu'elle existe, elle a vécu ou va vivre en se remplissant; c'est différent d'une pièce où il n'y a pas d'étagères pour les recevoir. Quand j'arrive chez quelqu'un c'est la première chose que je regarde et quand il n'y en a pas, je suis étonnée; même chose pour les tableaux. Le reste m'est égal. Je préfère être dans un fauteuil défoncé pour contempler des tableaux que dans un canapé luxueux à contempler des murs vides.

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  29. Je ne lis jamais de journaux intimes ou de correspondances, à moins qu'ils n'aient été publiés avec l'accord de leurs auteurs. Autrement, je trouve cela profondément immoral. Ce n'est pas parce que les gens sont morts, ou qu'ils ont été célèbres, que leur vie privée doit être violée. En revanche, les journaux ou lettres publiés par l'auteur lui-même s'apparentent à n'importe quelle autre fiction. Toute biographie ou autobiographie est avant tout un récit imaginaire.

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  30. Je ris!
    (Ca fait du bien par ce temps de crachin breton:))
    Stendhal, Woolf, Amiel... lorsqu'ils écrivaient leur journal intime savaient très bien qu'ils allaient être publiés. Et cela n'a rien à voir avec de la fiction.
    Tout grand écrivain qui écrit son journal ou des lettres à son amante (Miller/Nin) sait que ça ne restera pas dans un tiroir.
    Si l'aubiographie est imaginaire alors c'est de l'autofiction en effet.

    Ce qui est très immoral en effet c'est de se servir de ses relations intimes pour en faire un roman (sans que la personne n'ait donné son consentement) :
    http://prdchroniques.blog.lemonde.fr/2011/09/07/ppda-condamne-pour-atteinte-a-la-vie-privee-et-contefacon/

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  31. Non, ce n'est pas un bon prétexte que de dire qu'ils doivent s'y attendre. Néanmoins c'est le cas pour certains, par exemple, les lettres de Marguerite Yourcenar, très sérieuses, qui avaient été copiées en double et ouvertement destinées à être publiées. Mais la publication posthume des lettres de James Joyce, ou celles de Kafka, est inacceptable. Ils n'ont jamais voulu que ces choses-là soient rendues publiques, mais il s'en trouve toujours des "ayant droit" peu scrupuleux. Je suis d'accord pour le roman, et c'est exactement le même procédé. Se livrer à de telles indiscrétions rend pour moi ces oeuvres-là illisibles d'emblée...

    Et pourquoi un grand écrivain devrait-il renoncer définitivement à écrire des lettres uniquement parce qu'il existe des gens indiscrets (y compris, et surtout, dans son entourage)? Ne serait-ce pas mieux de diffuser l'idée qu'il ne faut pas lire des lettres qui ne nous sont pas destinées?

    Toute autobiographie, tout journal intime contient autant d'inexactitudes, de licences poétiques et de mensonges que n'importe quel roman. Seul le titre change... Mais quelle occasion rêvée d'arranger la réalité à notre guise.

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  32. Je ne fais pas le poids là, mais j'aime nos divergences.
    Je pars en vacances... avec Romain Gary (0_0)... à bientôt!

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  33. Super, pour vous; en ce qui me concerne, je suis en pleine rentrée, mais je ferai néanmoins une petite escapade à Florence à la fin du mois :-)

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  34. Un dernier... pour la route :

    http://youtu.be/Q_uaI28LGJk

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  35. Merci, c'est vraiment très drôle. Mais il me semble que l'Acratopège avait fait un billet là-dessus, intitulé "technologie post-moderne" ou quelque chose de ce genre (?)

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  36. Dès le moment où un écrivain commence à trouver considération & succès, il faut se méfier de sa correspondance & de ses interviews. Seuls les écrivains inconnus & sans talent sont encore sincères.

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  37. J'irais plus loin ; en sachant que personne ne viendra contester ce qu'ils écrivent, parce que la correspondance et les journaux ne sont pas considérés comme de la fiction, ils peuvent déployer infiniment leur fantaisie. Les relations entre la fiction et les éléments biographiques sont, en revanche, plus subtiles et moins visibles que dans les formes admises d'autofiction. L'écriture part toujours d'éléments vrais, mais ils sont travaillés, transformés et rendus méconnaissables par les exigences de la fiction. Rien ne vous empêche de reproduire les décors africains ou chinois que vous connaissez bien... Mais retranscrire la vraie vie, en prenant compte de tous ses aspects répétitifs, inintéressants et triviaux, on en serait à "Funes ou la mémoire", de Borges, où le personnage principal se souvient de tout, et donc peut reconstituer de mémoire ce qui s'est passé pendant une journée, cependant cette activité lui prend exactement 24 heures.

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  38. C'est un aspect: décrire la vie quotidienne en Afrique ou en Chine, même en serrant la réalité au plus près, pourra passer pour de la fiction à un lecteur peu apte à franchir les distances. Dans un même esprit, on peut créer une fiction en mélangeant des scènes sorties de leur contexte géographique: des paradoxes accidentels.

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  39. Ou en brouillant les dates, les caractères et les noms propres, c'est-à-dire en renonçant sciemment à toute reconstitution de la vérité historique, mais en laissant la place, peut-être, à une vérité personnelle.

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  40. C'est un autre aspect.
    Par contre, dans la littérature américaine, on trouve des talents à part qui réussissent à provoquer des émotions en décrivant avec simplicité et efficacité des événements de la vie quotidienne.
    Pour moi, c'est le sommet de l'art littéraire.

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  41. La simplicité est souvent trompeuse... C'est peut-être pour cela que je m'intéresse particulièrement à ce qui se fait en Asie, mais, au fond, c'est probablement seulement une question de goût.

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  42. En Chine (beau coin de planète, certes), tout est entouré de formalisme et de conventions, qu'il faut connaître sur le bout de son pinceau pour ne pas passer pour un ignare.
    Un dialogue de lettrés n'est qu'un échange de références littéraires & philosophiques remontant les siècles.
    Depuis la création de la Nouvelle Chine on utilise le même procédé, mais sur un calendrier restreint. Les personnes au pouvoir se citent les uns les autres, mais avec un sous-entendu qui peut vouloir affirmer le contraire, suivant le contexte.
    Par contre, une bonne citation lancée au bon moment peut avoir un bras de levier colossal: avec son "Peu importe que le chat soit gris ou noir pourvu qu'il attrape les souris" Deng Xiaoping a propulsé son pays à la place qui est la sienne aujourd'hui.

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  43. C'est une belle mise en abyme, lorsque les citations renvoient à d'autres citations et ainsi de suite. Tout l'intérêt du conservatisme, du point de vue culturel est là: celui de créer un contexte reconnaissable et partagé par tous (sauf par les ignares).

    Mais si la citation a été lancée au bon moment, il s'agit peut-être d'une simple question de chance.

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  44. Chance pour la Chine que Deng prononce la phrase que plus de 900 millions d'habitants (à l'époque) souhaitaient entendre. Il faudrait parler de connivence entre les deux, car comment savoir à l'avance ce que les uns attendent et ce que l'autre va dire ? Une conjoncture favorable est un bon terrain pour les audaces politiques.

    A propos des citations encore: Mao avait dit, à l'époque où il s'écartait des classique du genre, que dans Staline, il y avait 70% de bon et 70% de mauvais. Formule reprise par Deng à une époque favorable à la réforme, disant que dans Mao, il y avait 70% de bon et 70% de mauvais. Là, tout le monde a compris, même les plus bouchés.

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  45. Croisement de deux vieux adages : "Nihil novi sub sole" et "Sic transit gloria mundi" :-)

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  46. Dommage, car le 70/70 était génial, on pourrait ajouter : et 30% de banal.

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  47. Comme au Cercle Littéraire, le Salon rose a été repeint: très joli. Il faut meubler maintenant.

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  48. J'en suis encore là, aux meubles. J'installerai ces jours-ci plusieurs applications pour ranger le salon, présenter des articles en plusieurs langues sans que ce soit trop compliqué de les trouver...

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  49. Puisqu'on en est à essuyer les plâtres, il y a un bug au niveau de la rubrique "Recent Comments" (caractères spéciaux) qui persiste dans la nouvelle version. Pouvez-vous identifier le problème ? (c'est déjà le résoudre).

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  50. Voilà, c'est fait. Et il faut remercier le blog viti-vino.blogspot.com, qui m'a fourni l'outil nécessaire :-)

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  51. Et c'est aussi fait pour les onglets, avec un joli ruban rose.

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  52. Beau travail ! ça prend de l'ampleur.
    Est-ce qu'il y aura aussi des 中文读物 ? c'est l'équivalent chinois des "Lecturas en español".
    (rassurez-vous, c'est uniquement pour tester si le nouveau modèle affiche les petites fourmis).

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  53. Oui, les petites fourmis n'ont pas de souci à se faire; par contre je m'en fais toujours pour cause de pages statiques et dynamiques, mais je finirai pas trouver, comme pour le reste...

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  54. Vous allez mettre aussi "voyages" ? Et le ruban était fort seyant, comme on dit en Belgique.
    Kesaco pages statiques/dynamique? vous parlez des pubs agressives qui sautent à la figure dès qu'on ouvre la page?

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  55. Non, pas de fenêtres pop-up, j'ai horreur de ça :-). Il s'agit seulement de pages de blog où l'on peut envoyer des commentaires. Maintenant le problème est résolu, mais le ruban a disparu. je devrais fermer le blog pour travaux ;-)))

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  56. Le ruban, fort seyant, (belle expression) est de nouveau là, les bugs ont été corrigés et tout est prêt pour le contenu. Mais je serai toute la journée à Sion, aujourd'hui; alors les prochains développements se feront la nuit.

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  57. Vous avez raison de quitter Sion avant la nuit, c'est plus prudent. Au fait, et c'est sans rapport, ce n'est pas la saison de la brisolée ?

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  58. Ohmondieumaman! C'est très beau ici; que de changements et P.A. a aussi changé de photo!!! de plus, profil musical. Quel séducteur (=_=). Mmm...iam! Bon, reprenons nos esprits:)

    Inma, super cette nouvelle présentation.
    J'ai fait cette vidéo en vacances spécialement pour vous. Bon, elles seraient mieux dans la nature que au zoo mais je les ai trouvé craquantes.

    http://www.wat.tv/video/mov04499-468hj_3j6ij_.html

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  59. @Ambre, c'est superbe, elles sont si drôles :))) Leur comportement ressemble un peu à celui des chats. Certains recueillent aussi des loutrons abandonnés ou des loutres blessées pour les relâcher dans la nature plus tard, comme ici. C'est d'ailleurs le seul site à ma connaissance qui vend des loutres en peluche. J'en ai acheté plusieurs, ainsi que des livres.

    http://www.ottershop.co.uk/acatalog/Meet_the_Otters.html

    Merci beaucoup pour cette jolie vidéo.

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  60. Je comprends maintenant pourquoi vous aimez les loutres, c'est vraiment adorables et leurs petits cris étaient très jouissifs:))
    Je n'ai pas vu de loutre en peluche à vendre au zoo de La Palmyre :

    http://www.zoo-palmyre.images-en-france.fr/loutre.html

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  61. @Pierre-André, oui, c'est la saison de la brisolée, mais aussi, je pense, des feuilles qui prennent des teintes orangées ou rouges. Je prendrai quelques photos de forêt ce week-end.

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  62. Ne connaissant pas ce mot la "brisolée" j'ai cru qu'il s'agissait d'une espèce de rosée (0_0)ne me demandez pas pourquoi. Renseignements pris, saison des chataîgnes ici aussi, nous faisons la même chose avec une poêle trouée sur les braises.
    Et là, du coup, allez savoir pourquoi, je pense à Jim Harrison "Les Aventures d'un gourmand vagabond".

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  63. Je n'ai pris que des photos de gares ;-) Pour les couleurs de l'automne, il faudra attendre un mois environ...

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  64. La Gare de Perpignan transfigurée par Salvador Dali:

    http://storage.canalblog.com/80/08/297988/22215913.jpg

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  65. Merci P-A.R! Je vais mettre en ligne des images bientôt, dès que j'aurai fini avec des problèmes épineux de pistolets à peinture, rideaux et autres dalles. Inma

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  66. Un pistolet à peinture: ça permet d'exécuter un tableau qu'on n'aime pas ?

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  67. Oh! Géniale inspiration P.A.!

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  68. Pour en revenir au sujet, malgré une digression de 70 commentaires, je vous conseille fermement de lire "La Route de la Servitude" de Friedrich Hayek. Si Inma mentionne son nom, ce n'est pas pour rien.

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  69. "C’est ainsi que l’auteur rappelle les passionnantes théories de Poincaré sur la difficulté de se projeter dans l’avenir sans tenir compte d’un nombre toujours croissant de facteurs incertains, et de la complexification liée à un effet de diffusion, d’effets entraînant d’autres effets (idée reprise ultérieurement sous le nom de « théorie du chaos »), ou évoque, par opposition aux courbes gaussiennes, celles de Benoît Mandelbrot, qui se basent sur la géométrie fractale et qui intègrent des variations extrêmes et certains hasards. Je suis restée pourtant sur ma faim, malgré la densité de l’essai, à propos des limites de la connaissance et l’absurdité d’une planification « scientifique » selon Friedrich Hayek, mais c’est une bonne raison pour lire ou relire ses œuvres."

    Si Inma mentionne son nom c'est parce qu'elle est trop forte (douée). Non mais, mon cerveau est un pois chiche à côté du sien, comment voulez-vous que je lise "La route de la servitude"?

    Je m'en vais étudier les "courbes gaussiennes" et la "géométrie fractale" (pauvre de moi, je ne sais même pas ce que ça veut dire)... allongée sur un sofa d'où j'apercevrais (en rêve) les courbes noires de la Dent d'Oche et sa géométrie fractale. Il me faut du concret!

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