Les Falaises de Wangsisina
À propos de Les Falaises de Wangsisina, de Pavan K.
Varma
Anand, qui possédait tout, commence par tout
perdre. Le jeune avocat, travaillant pour un prestigieux cabinet à Delhi, marié
à la belle Tanu, se retrouve du jour au lendemain seul, car sa femme le quitte
pour son meilleur ami, qui est accessoirement son patron. Il est aussi mis à l’écart
dans son métier, à cause de son penchant pour l’alcool, et pour que le désastre
soit complet, le médecin qu’il consulte pour des douleurs persistantes lui
diagnostique un cancer du pancréas au stade terminal. La trame jadis bien
tendue de la comédie sociale, des ambitions brûlantes et de la force de l’inertie
laisse alors apparaître des déchirures irréparables. Anand n’a plus qu’à s’asseoir
et attendre la mort. C’est sans compter sur une erreur de diagnostic
providentielle, qui lui rend la santé et une liberté inattendue. Le moment est venu pour lui de voyager, et de s’habituer
à une existence sans attaches. Anand s’installe dans une vallée du Bouthan, au
milieu des bois et des falaises qui renferment de belles et tristes légendes, des lieux presque enchantés qui semblent retenir longtemps leurs hôtes.
Jusque-là, et si l’on fait abstraction des
prénoms et des choix vestimentaires, le récit pourrait avoir lieu en Europe ou
aux États-Unis. Il est question de problèmes de couple, de dégringolade
professionnelle et d’une attitude désemparée face à la mort. Il est question de
l’indispensable qui devient soudainement dérisoire. Des thèmes qui nous sont
familiers dans une société mondialisée, urbaine et assez déconnectée de la
réalité à certains moments, et qui est également un portrait d'une certaine Inde contemporaine. Pourtant, la deuxième partie du roman va nous faire
découvrir d’autres saveurs et d’autres lignes de vie, avec cette promenade initiatique dans un pays petit et méconnu, où il faudra trouver des véritables
richesses dans des traditions libératrices du corps et de l’esprit. L’esprit
qui est « un animal bizarre », s’adaptant tour à tour à un environnement
stressant, mais nécessaire, puis à une période d’introspection ou un ermitage
choisi.
C’est ainsi, qu’Anand, se débarrassant des soucis anciens, va découvrir
les mystères d’une philosophie où le sexe et l’appréciation de la nature jouent
un grand rôle. Une femme, amie et amante, lui servira d’intermédiaire dans ce
processus de renaissance aux perceptions et aux émotions, rythmé par la poésie et par la rencontre avec un disciple de Drukpa Kunley, le « fou
divin » du XVI siècle, qui rappellera les principes du tantrisme à Anand
et à sa compagne. Les Falaises de
Wangsisina nous ouvre des pistes cachées, difficiles de reconnaître dans le
monde moderne mais on ne peut plus évidentes pour ceux qui osent s'y aventurer, avec une
bonne dose d’optimisme.
Image : http://www.actes-sud.fr/catalogue/litterature-etrangere/les-falaises-de-wangsisina |
Les Falaises de Wangsisina, de Pavan K. Varma, traduit de l’anglais (Inde) par Sophie
Bastide-Foltz. Actes Sud, 2014
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